Beethoven : Christus am Ölberge. Rilling.

Le Christ au mont des oliviers est l’unique oratorio de Beethoven. Il fut composé à l’aune des chefs d’oeuvre de Haydn La Création Les Saisons mais surtout Les sept paroles du Christ en croix. Le livret est inspiré des thèmes bibliques mais le choix de son sujet est assez révélateur des tensions que subissait Beethoven à cette période de sa vie. Pression des commanditaires, inéductabilité de sa surdité. Il corrige ainsi le texte du librettiste Franz Xaver Huber pour l’adapter à sa situation personnelle, son propre désarroi. Musique et texte sont ainsi intriqués de façon définitive, façon à lui d’imposer la dignité de son statut de créateur. La dramaturgie en reste assez sommaire et ne fait pas de l’oratorio un opéra, et les rôles y sont curieusement ditribués. Le Christ est interprété par un ténor (et non un baryton), et le rôle du Séraphin est surajouté pour intégrer une voix de soprano à l’ouvrage. Helmut Rilling ne peut diriger une telle œuvre sans manifester ses qualités d’homme et de chef : alacrité, mesure, probité, empathie ; il entraine son petit monde : l’orchestre, le choeur et ses trois solistes au fil d’une interprétation gorgée de tendresse et d’enjouement (l’aria « Meine Seele » chantée avec candeur par Maria Venuti). Malgré un timbre sans grand charisme, Keith Lewis est un Jésus crédible et touchant. Quant à Michel Brodard, il incarne un Pierre suffisamment caractérisé. Tout participe d’un beau lyrisme et diffuse une telle générosité (le duo « So ruhe denn »!) qu’il est difficile de résister. Ajouter les grattements du microsillon et vous tenez là une version historique! (Jérôme Angouillant)