Chostakovitch : Quatuors à cordes n° 3, 4, 7. Meta4

Compositeur majeur du XXème siècle, Chostakovitch fut longtemps maintenu dans un certain degré d’ignorance hors de l’U.R.S.S. et des républiques populaires d’Europe centrale. Ses compositions subirent souvent un ostracisme de la part des tenants de la modernité la plus radicale en Occident. La notoriété de Chostakovitch s’attacha surtout à vénérer des oeuvres de circonstances liées à la glorification du régime stalinien. Ainsi, la légendaire 7ème symphonie « Léningrad » fut, universellement, popularisée lors du tragique siège de la ville en 1941-42. Au-delà d’une soumission au régime, seulement apparente, l’attitude du compositeur consista souvent à introduire, par une écriture très habile, notamment dans sa musique de chambre, des éléments critiques subtilement travestis. Malheureusement, ces partitions émergèrent tardivement du silence. La plupart des œuvres de chambre de Chostakovitch mettent à nu l’univers intime d’une personnalité tourmentée par les turbulences politiques de son temps. Les quinze quatuors à cordes se révélèrent comme des joyaux de l’écriture dédiée à cet ensemble, de même que les dix-sept quatuors à cordes de son ami Mieczylaw Weinberg récemment révélés. Le quatuor à cordes n°3 constitue une sorte de prolongement de la 8ème symphonie dont il traduit le caractère de grande tension dramatique. Le mouvement lent évoque un climat d’inquiétude auquel succède l’angoisse extrême traduite dans le 3ème mouvement. Composition très lyrique et transparente, le quatuor n°4 énonce quelques thèmes hébraïques. Formé en 2001, le quatuor finlandais Meta4 remporta le premier prix du Concours International de quatuors Chostakovitch de Moscou en 2004. Par leur immense talent, les musiciens mettent à la perfection en relief les somptueuses sonorités de leurs instruments, tous issus de la lutherie italienne du XVIIIème siècle. Grâce à ses immenses qualités, le quatuor Meta4 parvient ainsi à savamment traduire toute la profondeur de la pensée contenue dans ces pages magistrales. Une prise de son fine et précise s’ajoute à la perfection musicale qui augure, peut-être, d’une grande intégrale des quatuors à cordes de Chostakovitch. (Pierre Vassal)