Rimski-Korsakov : Romances choisies. Prudenskaya, Garben.

Rimski-Korsakov ne se remit jamais d’avoir été un autodidacte. Il composait avec peine, et sortait exsangue de ces périodes, d’autant que ses fonctions officielles ne lui laissaient pas beaucoup de répit. A comparaison, ses mélodies (qu’il baptisait Romances) coulaient facilement de sa plume, son inspiration procédant exclusivement des textes (Tolstoï, Lermontov, Pouchkine entre autres). Rimski n’a rien laissé de notable pour piano seul. L’écoute du disque est révélatrice : ce n’était pas son mode d’expression privilégié. Il faut toute l’imagination (et l’expérience) de Cord Garben pour transcender la relative pauvreté de sa partie et trouver un équilibre avec Marina Prudenskaya, lui apporter de nouvelles couleurs… s’il était besoin. Les Fricka et les Waltraute n’ont rien altéré de ce somptueux velours. On se délecte des moirures d’un timbre nourri par un souffle profond et un vibrato dosé avec art (Jevrejskaja pesnja, envoûtant, qui annonce le chant hindou de Sadko), de cette mezza-voce parfaitement timbrée (Usni pechal’nyj drug), de ce grave abyssal (la mezzo russe est aussi une Erda recherchée), de ces aigus impeccablement projetés (Solovej). Un disque magnifique. (Olivier Gutierrez)