Friedrich Kiel : Requiem. Bischoff, Schumacher, Ameln, Baek, Stoffels.

C’est une œuvre atypique d’un compositeur presque inconnu que propose l’éditeur allemand Rondeau Production. Éclipsé par la postérité de Brahms – son compatriote et cadet de douze ans – Friedrich Kiel fut en son temps un compositeur et pédagogue apprécié, au legs chambriste éminent. Dès 1862, il se fait applaudir à Berlin avec ce Requiem, que le chef d’orchestre Julius Stern transcrit seize ans plus tard pour piano, solistes et chœur – version ici enregistrée. L’accompagnement pianistique ramène d’autant plus à la Petite Messe Solennelle de Rossini de 1864 (comme on sait pour deux pianos et harmonium), que Kiel s’éloigne, lui aussi, d’un pathos religieux codifié. Si sa partition suit l’ordinaire de la messe des morts, il lui arrive même de sonner avec une alacrité voire une désinvolture surprenantes, compte tenu de sa destinée funéraire. La progression sautillante du Kyrie ou les psalmodies ridicules de l’Osanna relèvent ainsi du hors sujet liturgique – un écueil que Rossini avait brillamment su éviter. L’Ensemberlino Vocale répond par sa belle homogénéité et sa souplesse aux visées manifestement philologiques de Matthias Stoffels : on croirait presque à ce qu’on écoute, si quelques traits acidulés de la soprano soliste ne venaient en altérer la tenue. (Jacques Duffourg-Müller)