Heureuse initiative : Donald Fraser propose une orchestration du sombre Quintette en la mineur qu’Elgar composa durant l’été 1918. Reclus dans son cottage de Brinkwells, il avait abandonné l’orchestre pour ne plus se consacrer qu’à la musique de chambre : la tout aussi ténébreuse Sonate pour violon et piano, le Quatuor si lyrique datent de la même période. Le reconduire à l’orchestre serait-il un contre-sens ? Non, car la proposition de Fraser compose une vraie symphonie où le piano a disparu pour entrer tout entier dans le corps harmonique instrumental. L’effet est plus d’une fois saisissant, comme dans le sublime Adagio, un des sommets absolus du génie elgarien, et Kenneth Woods donne de l’ampleur au discours, sculptant les lignes, faisant chanter l’harmonie. Je ne bouderais pas plus l’autre proposition de Fraser, plus délicate pourtant. Elgar avait pensé ses Sea Pictures autant pour une contralto que pour un grand orchestre. Finalement Fraser ne s’éloigne pas trop de l’original bien qu’il ait substitué à la voix soliste un chœur mixte et réduit l’orchestre en le calibrant sur celui qu’Elgar emploie dans son Introduction and Allegro : il aura préservé l’esprit d’un cycle de mélodies au lieu de l’élargir vers l’oratorio. Bien vu, finement réalisé, voila un album qui trouvera sa place dans toute discothèque elgarienne (Discophilia – Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé)

0/5 (0 Reviews)